JULIEN AMILLARD

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STEVE

 

 

 

son bike entre ses jambes

Balantines à la main

Je vais venir vous parler

 

et il parle

parle

il vient d’Harlem

mais avant tout d’Afrique du Sud

il a une base ici, sur Toulouse

mais ce n’est pas chez lui

 

Chez lui

c’est en Afrique

avec les lions gazelles macaques éléphants

la nature

la vraie vie

vous avez déjà navigué ?

 

Non…

 

une fois que tu seras allé en mer

tu détesteras la terre

c’est sur la mer

la véritable liberté

Au début,

tu vas vomir

tu vas tout vomir

tous tes restes de la terre

La mer, elle commence

par te laver entièrement

ensuite elle t’accepte

et te donne

te fait des cadeaux

des poissons comme jamais ailleurs tu pourras en avoir

la meilleure bouffe du monde !

mais des fois

elle te rejette

elle Up and Down

elle ne veut plus de toi

elle te creuse et te soulève entre

ses vagues

et tu ne peux rien faire

rien d’autre qu’attendre et résister

mais tu es libre

libre

LIBRE !!!

 

 

 

 

 

 

 

LES NAZIS LES BRÛLAIENT

 

 

 

 

 

Jeune homme !

Jeune homme !

venez voir !

venez voir

ça !

vous voyez :

dans la beine bleue,

la beine à recycler

des livres

des centaines de livres

déchiquetés

dilapidés

sans corps ni couverture

ils gisent

Vous savez ce que c’est ça ?

 

Vous allez me le dire…?

 

c’est du NAZISME !

 

ce serait du nazisme

ils les auraient brûlés… ?

 

Non,

c’est du nazisme !

ils empêchent les gens

de lire

d’ouvrir

leurs esprits

en les privant

de ces livres !

 

oui,

ils auraient au moins pu

les offrir à une

bibliothèque

qu’en tirant sa couverture

sa tranche se révèle :

Mais ça appartient à une bibliothèque ?!

 

oui

ça appartient à cette bibliothèque

celle que je n’avais pas vu

en passant par derrière…)

voilà comment ils vous brident

l’esprit

en jetant

les livres dérangeants :

principalement des bio :

Dylan Hendrix Floyd Marley…

et des encyclopédies :

tome 3,  Dictionnaire des littératures de langues françaises

lettre P : Philipe de Mézières

ou Maizières

ça dépend des régions :

La vie aventureuse et les rêves de croisade

L’impossible tentative du Songe

et je me souvenais

de tous ceux

qu’on ne lisait plus

et que mon père avait offert

aux bibliothèques

se disant

ça fera des heureux

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROPRE AU MAIRE

 

 

 

 

 

dîtes monsieur

 

oui ?

 

là je vois

vous nettoyez la rue

je le vois

tous les jours vous nettoyez la rue

et tous les jours c’est sale

tous les jours il y a des mégots de cigarettes

et tous les jours vous nettoyez

vous pensez pas qu’on peut faire quelque chose

pour que les gens arrêtent d’être

sales ?

 

euh… non, je crois pas

à part continuer à nettoyer

tous les jours

 

bon , dans ce cas,

je vais écrire au maire

et voir avec lui si on peut pas faire quelque chose

pour que les gens arrêtent d’être sales

 

ok, et bien allez-y…

 

oui je vais faire ça

bonne journée

 

 

 

 

 

Paris Jim

 

 

 

 

 

 

 

Je titube. Je vacille. Je vertige. Je bourbon, bien droit bien sec bien coca pour dissimuler notre ivre de pierre en tombe… éructe à tout va, à toutes stèles, à tous noms hautement mort et littéraire en terre… qu’arrivés à Proust, saloperie de petit bourgeois ! cochonnerie d’écrivain ! moustache perdu de recherche ! étouffé par son manque de temps ! Allez, hop ! une première glaire pour le conspuer pffffttt une seconde pour mon bon bourbon bon merci

« pourquoi t’as fait ça ?! me demande Sarah tout aussi ivre, tout aussi rire, ne saisissant pas pourquoi on est là… ? pourquoi on Lachaise nos Pères… ?

 

- Il faut bien rendre la monnaie de sa fourche à l’aut’Roi Lézard qui peut tout faire ! surtout mourir de bain, la peau fripée et détendue, les muscles dissous et contractés, le vit toujours bien dressé, toujours bien baisé, toujours bien Wilde, gloss sur mes lèvres SMACK à la croupe… et elle goutte ma salive…

 

 

… bientôt… bientôt… pas tout de suite… pas encore… pas assez saoul… pas encore… glou glou toujours… entre les allées ne menant nulle part qu’à d’autres oublis… oubli de raison… oubli de pisser…oubli de gerber… oubli de danser… oubli de gesticuler à toute Shoa… un parti communiste à l’agonie… oubli de me perdre… oubli de me trouver… oubli de temps… oubli de rire… si proche… si prêt… pas encore… bientôt… bien tôt… bien trop tôt… bien assez tard pour le trouver… bien trop tard pour le trouver… bien trop tard pour déclamer…

 

 

 

« Le cimetière ferme. Revenez demain. »

 

 

 

 

 

 

… comme il vous plaira…

 

 

 

… ça tournicote en tout sens… ça patati en Germain… ça patata en Montmartre… ça danse… ça crie… ça tombe… rit… debout… hurle… HURLE !!!

 

 

 

« Arrête ! Tu fais peur aux enfants. Tu me fais honte, dit Sarah.

 

- C’est quoi tes conneries ?! Tout le monde en a rien à foutre ! Tu vois pas ?! Tous indifférent ! Atone à tout !!! Ridicules ! Ils en ont rien à foutre ! et ils ont bien raison ! Qu’importe ! Dansons Sarah ! Dansons ! Crions ! Brûlons ! Oui ! Brûlons ! Il faut tout brûler !!! Qu’il ne reste plus rien ! Qu’il ne reste qu’un souffle ! Qu’il ne reste qu’un souffle ! Qu’il ne reste que le silence !!!... oui… le silence…

 

                                                                         … ils en étaient tellement proches…

 

- Qui ?

 

- Tous… Ils en étaient tellement proches… si près… et à la dernière seconde… à la dernière encre… ils ont rebroussé chemin… Pourquoi ont-ils fait ça ?!... Pourquoi !?... tellement proches… Caro… pardon, Sarah… ils l’avaient vu… ils l’avaient vu et s’en sont détournés…

 

- Vu quoi ?

 

- Tout… rien… l’essence de tout… le silence…

 

                                                           … ils en étaient si proches…

… pourquoi a-t-il fait ça Sarah ?...

… il en était le plus proche…

… pourquoi ?...

 

- Qui ? Joyce ?

 

- Pfft ! Sûrement pas ! Beaucoup trop symbolique, beaucoup trop mégalo, beaucoup trop imbu de sa personne pour le voir. Non. Beckett… il en était le plus proche… pourquoi a-t-il fait ça ?... pourquoi ?...

 

                                                                       … et eux !...

… Regarde les !... Ils sont si beaux… si beaux… si magnifiques… si merveilleux… et ils ne voient rien… si beaux et ils ne voient rien… si beaux… et ils ne voient rien… si beaux… si magnifiques… si merveilleux… et ils ne voient rien…

… c’est pour eux qu’il faut le faire Sarah… il faut le faire… je suis désolé Sarah… si désolé… mais il faut le faire… on n’a pas le choix… on n’a jamais eu le choix… il faut le faire… et je tombe… je m’effondre… je pleure… je tremble… je crise… je larme… je rivière… je torrent… je feuille… au milieu de la rue… au milieu des passants plus morts que les tombes… face l’asphalte… face le monde… face moi… si fatigué… si épuisé… et elle est là…

… elle me prend dans ses bras… me réconforte… ça va aller Julien… ne t’en fais pas… je suis là... tu m’écoutes ? Je suis là. Je ne t’abandonnerai pas. Jamais. Tu m’écoutes ? Jamais. Je suis là. Regarde-moi. Je suis là… Allez, viens…

 

 

 

                                                                                                          … on y va…

 

 

 

                                   … jusqu’au lendemain…

… estomac dans les talons… nausée à tous les étages… yeux ne décollent pas du sol… la gerbe… mais allons-y…

 

                                                                       … retour au Père Lachaise…

… derrière une tombe, un joint se roule, se fume, se lève, se marche entre toutes… cent cinquante… deux cents ans… juste avant la Révolution… juste après, les fossoyeurs déterrent un oubli… et des noms… et des tombes… et la sienne… et la KATA TON ΔAIMONA EATOY… et la page ouverte… la page déliée sur ce jeu… délicieux petit jeu qui rampe dans ta tête… s’enroule… se replie… s’écaille de gratte gratte gratte tes saines… devenir fou… petit jeu au serpent bien ssssssssiifffl sa fourche de pieds bien glissés autour de tes toi… les caresse… les entoure… les enjolive… les constrictor… jusqu’à la triste… jusqu’à la corde… jusqu’au sol de sa tombe larme de pétales jetées par Sarah à chaque pique… à chaque sueur qui court court court le long de ma voix… le long de ma gerbe… le long de cette chanson à l’air perdu maintenant retrouvé que face sa tombe…

 

 

 

 

 

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